STEPHEN KING et les EC Comics, les comics d’horreur
Stephen King est un grand fan des comics d’horreur, ces EC Comics, qui furent populaires, aux USA dans les années 50s avant d’être interdits par la censure américaine.
Ainsi, ces EC Comics lui ont inspirés plusieurs histoires, notamment : The Blue Air Compressor (nouvelle inédite, publiée dans le magazine Onan, en 1971), le film CREEPSHOW (qui fut par la suite transformé en BD, illustrée par Berni Wrightson), ou encore la nouvelle « la cadillac de dolan », qui lui fut inspirée par le comics « Vault of horror #26)
Or, devant la forte popularité des comics aux USA (ce qui n’est plus à prouver devant le succès des Comic Con et des nombreuses adaptations cinéma), les EC Comics font petit à petit leur retour. Y comprit en France.
Ainsi, je vous mentionnais en 2012, qu’en France, les éditions Akileos relançait la série « Tales from the Crypt », mais j’ai remarqué, cette semaine, une publicité dans le journal parisien du métro : A Nous Paris : une publicité concernant une nouvelle collection d’EC Comics, nommée Doggy Bags, et proposée, en kiosque, par les éditions Ankama, via leur label 619.
Tout en cette publicité reprend le style des EC Comics!
Vous retrouverez ci-après la publicité, que vous pouvez agrandir en cliquant dessus :
(Cliquez sur la photo pour l’agrandir)
En attendant de pouvoir vous parler davantage de cette série DOGGY BAGS, je souhaiterai vous proposer le texte correspondant à l’entrée sur les EC Comics, disponible dans l’indispensable livre, « Stephen King de A à Z« , écrit par George Beahm, et proposé en 2000 par Vents d’Ouest (© Vents d’Ouest) :
E comme E.C Comics :
« Dans les vieux E.C. Comics, les méchants sont toujours punis suivant les préceptes de la morale américaine traditionnelle. » (King, cité par Jessie Horsting, Stephen King at the movies)
Dans la scène d’introduction de Creepshow, hommage aux BDs d’horreur des années cinquante, un père furieux arrache un album de CREEPSHOW des mains de son fils, et le jette symboliquement à la poubelle.
Le message est clair : les BDs sont la plus vile forme de littérature. Impropre à la consommation humaine, elles viennent polluer l’esprit des jeunes, message que le Dr Frederic Wertham faisait sien dans Seduction of The Innocent, publié en 1953 par Rinehart & Company, dont la jaquette était très significative : ceci est le livre le plus choquant qui soit sorti depuis des années. Et ce devrait être le plus influent.
Seduction of the Innocent est le compte rendu complet et détaillé des conclusions du célèbre Frederic Wertham sur l’influence pernicieuse des livres de BD sur la jeunesse d’aujourd’hui. Aucun parent ne peut se permettre de l’ignorer.
Vous pensez que votre enfant est à l’abri? N’oubliez pas : 90 millions d’albums de BDs sont lus chaque mois. Vous pensez qu’ils parlent tous de lapins aux grandes oreilles, de gentilles souris et de petits chimpanzés? Allez voir…
Fort de son expérience et de nombreuses années de recherche, le Dr Wertham affirme simplement que les BDs sont une invitation à l’analphabétisme. Elles créent une athmosphère de cruauté et de tromperie, stimulant des rêveries malsaines, suggèrent des comportements criminels ou sexuels anormaux, incitent à la délinquance en fournissant des détails techniques.
Le discours critique de Wertham, rapidement repris dans les commissions du Sénat, c’était le signe que les parents attendaient. En conséquence, les BDs devinrent « auto-régulées », une façon polie de dire auto-censurées. L’industrie du livre de BD s’en trouva radicalement transformée, et pas en mieux.
Depuis octobre 1954, les BDs portent bien en évidence sur la couverture un cachet d’approbation, apposé par l’industrie elle-même. A partir de ce moment là, ceraines des meilleures BDs des années cinquante, dont les E.C. Comics connurent une mort lente.
Ce que Wertham ne voulut pas reconnaitre, et que les parents ne virent jamais, c’est que les E.C. Comics, contrairement à leurs concurrents, constituaient une édition de qualité, suffisamment pour que Russ Cochran les réimprime trente ans plus tard en couleurs d’après les originaux, en éditions reliées cartonnées, dans des coffrets illustrés, avec l’attention qu’on réserve habituellement aux oeuvres d’art les plus illustres (King lui-même en possède la collection complète dans sa bibliothèque).
Les E.C. Comics, c’étaient : Weird Science, Weird Fantasy, Frontline Combat, Two-fisted Tales, Vault of Horror, Tales from the Crypt, Haunt of Fear, Crime Suspense Stories, Shock Suspense Stories. Chacunes étaient des oeuvres d’art dans leur registre, bien écrites et bien dessinnées, et surtout ces histoires avaient un sens moral.
Stephen King a souvent dit que les histoires d’horreur devaient garder une certaine moralité. Il ne suffit pas, dit-il, de lancer des effets pour surprendre ou abrutir le lecteur. Le travail de l’auteur est de faire éclater la vérité, et cela veut dire que les méchants doivent être punis. La destruction vient de l’intérieur.
Ce sens de la morale constituait la pierre angulaire des EC Comics. Derrière les couvertures racoleuses, on trouvait bien des histoires sordides (présentées hors de leur contexte, un pays inquet se disait « Je n’ai pas besoin de lire ces horreurs pour savoir que ce sont des horreurs »), et pourtant, les méchants récoltaient toujours ce qu’ils avaient semé dans une histoire des EC Comics.
CREEPSHOW est un tendre hommage à ces BDs. King et Romero (qui a réalisé le film) adoraient ces collections, et cela se sent. Le film comme l’adaptation en bande dessinée évoquent délibéremment le ton et l’imagerie des BD d’horreur des années cinquante.
La bande dessinée déborde de références directes et indirectes aux séries d’origine. Le squelette qui accueille le lecteur, le thème de la juste vengeance, jusqu’au style de Bernie Wrightson, qui se serait sentit à l’aise au milieu des dessinateurs des EC Comics qui sont ses idoles.
Est-ce que CREEPSHOW est une oeuvre d’art?
Bien sur que non!
Mais c’est une excellente distraction, une fiction morale et si elle n’est pas terrifiante, elle arrive à vous écoeurer, ce qui est déjà pas mal. Si ce n’est pas éducatif, c’est vraiment amusant.