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Divers

Steve’s Rag 22 – Déjeuner au Gotham Café : Une nouvelle Dionysiaque

Une nouvelle Dianysiaque

(Roland Ernould)

 


 

« Personne ne peut prédire les ultimes conséquences de ses actes. » (28)

Déjeuner au Gotham Café1,

    Quand King commence une histoire, il utilise habituellement le procédé bien connu de l’intrusion du désordre dans l’ordre, du dionysiaque dans l »apollinien2. L’ordre, c’est la famille qui ronronne, le couple qui fonctionne bien, la petite banlieue tranquille. Bref, ce qui donne aux choses leur allure habituelle, la vie avec ses petites joies et sans grandes surprises. Gotham Café est un bon exemple de la nouvelle qui dérape d’un désordre ordinaire pour atteindre le délire dionysiaque intégral. Ce récit a en outre la particularité d’utiliser plusieurs des peurs avouées ou cachées de King.

Le dionysiaque ordinaire.

    L’histoire paraît banale. La situation de l’homme délaissé par son épouse a déjà été traitée par King longuement dans Chantier, où cet abandon ne se produit pas comme ici au début du récit. Dès la première phrase de Gotham Café, le lecteur est informé de l’infortune de Steve Davis, un jeune financier salarié, qui ne prend pas vraiment à cœur son travail, mais aime beaucoup -à sa manière- sa femme Rita. Effondré dans son appartement vidé de toutes les affaires de son épouse, il rumine. Son épouse, à laquelle il est marié depuis deux ans, a quitté le domicile conjugal. Quelques phrases sur un papier sur la table de la salle à manger, « bel échantillon de littérature glaciale. » Une surtout qui fait réagir douloureusement: « Tu auras de mes nouvelles par William Humboldt, mon analyste. » «  »Et des nouvelles de ça, t’en veux pas, mon chou? » demandai-je à la pièce vide en me tenant l’entrejambe. Plutôt raté, le ton dur; et question humour, c’était nul. Quant au visage que je voyais se refléter dans le miroir, à l’autre bout de la pièce, il était blanc comme linge. » (22).
    ll se demande par quel mystère il n’a rien soupçonné de ce qui se tramait: « Comment avais-je pu me faire avoir aussi proprement? (…) Bêtise? Insensibilité? Repassant dans ma tête les six ou huit derniers mois d’un mariage qui datait de deux ans, j’en arrivais à la conclusion que c’étaient les deux. » (23)
    Il apprend vite que ce que sa femme désire obtenir, c’est la clef de leur coffre en banque. Et il se décide à consulter un avocat, conseillé par un ami: « Je ne désirais nullement divorcer: j’étais furieux contre elle, mais il ne faisait aucun doute que je l’aimais toujours et ne voulais qu’une chose, qu’elle revienne. » L’avocat écoute son histoire: « Si j’étais tout à fait sûr qu’elle veuille le divorce, je crois que les choses seraient plus claires dans mon esprit, dis-je pour terminer.- Tout à fait sûr? Vous pouvez l’être, répondit-il aussitôt. Ce Humboldt n’est qu’un éclaireur, monsieur Davis… et il pourrait peser lourd, devant un tribunal. (…) Donnez cette clef, mon vieux, et Humboldt disparaîtra du paysage. (…) Oh ça oui, elle veut le divorce. Et comment! Et en plus, elle n’a pas l’intention de partir les mains vides. » (26)

Le tabac.

    Au désordre qui s’est installé dans sa vie, Steve va réagir par une réaction positive apparemment, pour y remettre un certain ordre. Depuis vingt ans, il fume entre vingt et quarante cigarettes par jour, sans se « souvenir d’aucune décision d’arrêter, d’aucune protestation intérieure. » (26) Et voilà qu’il se retrouve « à un moment donné », « face à une fenêtre ouverte » à balancer « dans la nuit, sans autre forme de procès, la cartouche, la demi-cartouche et les deux ou trois paquets entamés qui traînaient dans l’appartement. » (26) Une réaction certes contre son épouse: « Elle m’avait harcelé tous les jours depuis deux ans -j’allais contracter le cancer, j’allais lui faire contracter le cancer, il n’était pas question d’avoir un enfant tant que je fumerais; et je pouvais aussi bien m’épargner la peine de gaspiller ma salive sur cette question. » (42)
    King n’a pas choisi innocemment le tabac, avec lequel il est en problème depuis qu’il s’est mis à fumer à l’université. Les allusions ou notations sont multiples dans son œuvre. En décembre 1973, à vingt-sept ans, King a été profondément meurtri et marqué par la disparition de sa mère, morte d’un cancer à soixante ans, et cette obsession le poursuit: « Si vous mangez trop de beefsteaks: cancer de l’intestin. Si vous buvez trop d’alcool: cancer de la gorge, alcoolisme, cancer de l’estomac (…). Nous sommes effrayés de fumer des cigarettes parce qu’elles donnent le cancer du poumon: nous sommes aussi effrayés de nous approcher des gens qui fument car nous pouvons attraper le cancer du poumon par leurs cigarettes. »3 Ce sont précisément les débordements auxquels il s’est longtemps livré. Mais les excès qu’il faisait jadis sans s’effrayer, maintenant il en craint les conséquences: il a trop bu, trop fumé, trop mangé4. Il surveille son poids, boit avec modération et essaie de moins fumer
    Jusqu’à présent, King avait décrit divers aspects des rapports entre les individus et le tabac, généralement succinctement5. Le plus récent et le plus long développement qu’il en avait fait se trouve dans La tribu des dix plombes. En 1992, il avait remarqué les groupes de personnes dans la rue, au bas des immeubles, lors de la pause-café devenue pause-cigarette…

    Il résume d’abord l’aspect sociologique. Les peurs des Américains en cette fin de siècle sont grandes et King y est sensible: « C’est le seul pays au monde où on est devenu complètement obsédé par le problème de la cigarette… Le seul, probablement, où les citoyens s’imaginent -et ils le croient très profondément- que s’ils mangent exactement les bonnes combinaisons de vitamines (…) et se torchent le cul avec le bon papier-toilette, ils vivront éternellement en restant toujours sexuellement actifs. » (497).
    Viennent ensuite les aspects psychologiques: les méthodes utilisées pour ne plus fumer (le timbre, la sonnerie, l’hypnose). La responsabilisation, comme ces fumeurs qui cessent quelque temps de fumer à la naissance de leur enfant, ou pour répondre aux supplications de leur femme. Bonnes résolutions, qui ne tiennent pas longtemps, en dépit des techniques utilisées: « chewing-gums, bonbons sans sucre, cure-dents et, bien entendu, un vaporisateur en bombe pour l’haleine, ainsi que leurs litanies tribales:(J’arrête pour de bon l’année prochaine étant la plus courante) ». Difficultés aussi à s’intégrer socialement: « Regards hargneux lorsqu’on est confronté à un panneau non-fumeurs, haussement d’épaules pour acquiescer quand une autorité accréditée vous dit S’il Vous Plaît, jetez votre cigarette, Monsieur. » (488)

    La nouveauté dans Gotham Café est la description psychologique des périodes de sevrage et de manque, vue elle aussi sous les deux aspects du couple Apollon/Dionysos. Dionysiaques les réactions en état de manque des premiers jours, qui vont presque jusqu’à l’agression: « Je fus sur le point de craquer des douzaines de fois -non, des centaines-, je résistai toujours à la tentation. J’avais l’impression, par moments, que j’allais devenir fou si je n’en grillais pas une tout de suite; et quand je croisais des gens à la cigarette au bec, dans la rue, je me sentais sur le point de hurler: Donne-moi ça, branleur, elle est à moi! »
    Ses nuits sont aussi difficiles: « Je restais parfois réveillé jusqu’à trois heures du matin, mains croisées sous la nuque, à contempler le plafond et à écouter les sirènes et les rumeurs grondantes des poids lourds du centre. Dans ces moments-là, je pensais au magasin coréen, ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre, situé pratiquement en face de mon immeuble, de l’autre côté de la rue; je pensais à l’éclatante lumière des néons, à l’intérieur, une lumière tellement brillante que l’on se serait presque cru dans une de ces expériences où on frôle la mort. » Bien sûr la mort, le dionysiaque par excellence.
    Il pense à l’homme derrière le comptoir et « aux formidables échafaudages de paquets de cigarettes devant lesquelles il trônait, échafaudages de paquets de cigarettes aussi volumineux que les tables de pierre que Charlton Heston ramène du mont Sinaï dans les Dix Commandements. Je pensais que j’allais me lever, m’habiller, descendre là-bas, acheter un paquet (ou neuf ou dix). » Le rappel du poids de l’ordre que représentent les lois divines est ici habilement juxtaposé au pouvoir destructeur de la transgression. « Je ne l’ai jamais fait, mais bien souvent, je me suis endormi non pas en comptant des moutons mais en égrenant des marques de cigarettes: Winston… Winston 100s… Camel… Camel filtres… Camel légères…  » (27/8) La véritable tentation de Saint Antoine… Contre laquelle il faut lutter jusqu’à l’apaisement apollinien.
    « Plus tard (…) j’en vins à considérer que ma décision d’arrêter de fumer à ce moment-là n’avait peut-être pas été aussi inconsidérée que je l’avais cru, et qu’en tout cas, elle n’avait pas été mauvaise. Je me demandais même si je n’avais pas fait preuve d’intelligence et de courage, moi qui, pourtant, ne brillais pas particulièrement par l’une ou l’autre de ces qualités. C’est tout à fait possible; il arrive parfois que nous nous élevions au-dessus de nous-mêmes. » (28) Le triomphe d’Apollon.

L’amour ambivalent.

    À plusieurs reprises, Steve proclame qu’il aime sa femme. Mais de quel amour? Il ne s’intéresse pas à son travail, ni à ce qu’elle fait, et ne se livre pas: »Je suis comme ça et je l’ai toujours plus ou moins été. Diane en parlait comme de mon côté obsessionnel », au début de notre mariage, mais je pense qu’elle avait fini par comprendre. Je ne fais pas confiance aux autres, c’est tout. J’admets volontiers que c’est un trait de caractère agaçant et je voyais bien qu’il la rendait folle. » De nombreuses notations éparses indiquent que King a voulu montrer que le seul intérêt qu’il lui portait était d’ordre sexuel. Il se méfie des autres: (34) Quand le psy téléphone à Steve pour lui dire qu’il souhaite, pour mettre au point certains aspects de leur mariage, organiser une entrevue avec Diane, réapparaît le conflit Apollon/Dionysos: « Je soupçonnai que ces « certains aspects » se réduisaient à la clef du coffre (…) mais ce que savait ma tête et ce que faisait mon corps étaient deux choses complètement différentes. Je sentais la rougeur me gagner, mon cœur s’accélérer, mon pouls battre dans mon poignet. » Il sait -sa raison sait- que la décision de revoir sa femme lui sera préjudiciable et que ce n’est pas une bonne idée: « Je savais pertinemment que ce n’en était pas une. Je savais aussi que j’allais accepter. Il fallait que je la revoie. (…) J’eus envie de lui demander de dire à Diane de porter la robe verte à pois noirs fendue très haut sur le côté. » (29)
    Son avocat lui reproche sa décision: «  »Dans ce scénario, l’avocat de Diane sera présent à distance alors que moi, je ne figure nulle part dans le tableau. Ça pue. »
Peut-être, mais elle ne t’a pas enfoncé la langue dans la bouche au moment où elle sentait que tu allais jouir, me dis-je. » Et l’avocat, qui l’a percé à jour, le met en garde: « Ne soyez pas naïf. Vous la retrouverez au restaurant, vous la voyez, elle, vous rompez le pain ensemble, vous buvez un peu de vin,elle croise les jambes, vous la reluquez un peu plus, et elle finit par vous convaincre de lui donner un double de la clef du coffre. (…) Et tout ce que vous aurez dit qui pourrait vous être préjudiciable pendant que vous regardiez ses jambes et pensiez que ce serait merveilleux de les sentir à nouveau s’enrouler autour de vous -tout cela sera déballé devant un tribunal. »(…) Une entrevue comme celle-ci est comme une joute. Ils vont arriver cuirassés, armés jusqu’aux dents. Vous, vous n’aurez que votre sourire à exhiber, sans rien pour vous protéger les couilles. et c’est exactement la région de votre anatomie qu’ils vont viser en premier. » (31/2)
    Le comportement de Diane n’est guère encourageant quand il la revoit: « L’expression de son regard était un concentré mortel de négation et n’aurait pas été plus parlante si elle avait eu FERMÉ JUSQU’À NOUVEL AVIS écrit sur le front. Il me semblait mériter mieux. » Au moment des présentations avec l’analyste, il n’a qu’une envie, « en finir avec ces mondanités pour ne plus m’occuper que de la jolie blonde au teint d’un rose crémeux, aux lèvres d’un rouge tendre et aux traits délicats. La femme qui, il n’y avait pas si longtemps, aimait à me murmurer « bourre-moi bourre-moi bourre-moi » au creux de mon oreille tout en s’accrochant à mes fesses comme si c’était une selle à double pommeau. » (41)
    L’entrevue ne donne rien, et les efforts sans consistance du psy ne changeront rien au blocage de la situation après quelques instants de discussion. Et plus tard, dans la rue, les événements terminés, les mots définitifs: «  »Fils de pute, gronda-t-elle. Espèce de fils de pute qui ne cherches qu’à contrôler les autres, à les juger! Étroit d’esprit, orgueilleux, content de toi! Je te hais. » (…) Elle fit sept ou huit pas puis se retourna vers moi. Elle souriait. Un sourire terrible. (…) « J’avais des amants », dit-elle sans cesser son terrible sourire. Toute son attitude était un mensonge, mais celui-ci n’en faisait pas moins mal. Elle souhaitait que cela fut vrai; cela se lisait sur son visage. « Trois en un an. Tu n’étais pas très bon dans ce domaine, alors j’en ai trouvé qui l’étaient. » » (62)
Aimer, souffrir, et faire souffrir…

Le psy.

    Dès la lecture du billet de sa femme où elle lui signifiait son abandon, l’esprit de Steve s’est focalisé sur le psy: « Le fait est, cependant, que je n’avais rien vu venir. D’où sortait-il, cet analyste? Quand le voyait-elle? de quoi lui parlait-elle? J’avais évidemment ma petite idée sur leur sujet de conversation: moi. Des trucs du genre comment je ne rabattais jamais le couvercle des toilettes après avoir pissé, comment j’exigeais des fellations à une fréquence insupportable (à partir de combien de fois était-ce supportable? Aucune idée), comment je ne manifestais qu’un intérêt mitigé pour son boulot dans l’édition. Autre question, comment avait-elle pu aborder les aspects les plus intimes de notre vie de couple avec un type s’appelant William Humboldt? Un nom de physicien au Caltech, ou encore d’obscur représentant à la Chambre des lords. » (22/3)
    Le point de vue négatif porté par King sur les psy ne s’est pas modifié en trente ans. Suspicion, méfiance et hargne rentrée. Dans Rage, Charlie, qui a pris ses camarades de classe en otages, disait des psy: « Une tête pleine d’instruments d’observations. Un fouilleur d’esprit, un bourreur de crâne. » (97) Et au psy intervenant par l’interphone pour négocier sa reddition, il avait posé ses conditions: « La prochaine fois que vous poserez une question, je tue quelqu’un dans la salle. » (98) De même Steven ne veut pas se laisser appeler par son prénom par le psy de Diane: «  »Je trouve que cette façon de m’appeler par mon diminutif est condescendante et insultante. recommencez, et je raccroche. Répétez-le moi en face, et vous saurez alors jusqu’où peut aller mon hostilité.
– Steve… Monsieur Davis… je ne… »
Je raccrochai. Ce fut la première chose qui me procura un peu de plaisir, depuis le moment où j’avais trouvé le mot de Diane sur la table, coincé sous son trousseau de clefs. » (25)

    À Rage avait succédé Le Croque-mitaine, où le personnage confiait au psy ses réticences et ses doutes. Réticences d’abord se rapportant aux problèmes personnels: « Je ne suis pas venu comme la plupart de vos dingues me pavaner dans votre salon en prétendant que je suis Napoléon ou que je me shoote à l’héroïne parce que ma mère ne m’aimait pas » (138) Cette confusion entre le psychiatre (ne pas être un « dingue ») et le psychanalyste qui ramène en partie les traumatismes psychologiques à la petite enfance (allusion au manque d’amour possible de la mère) sera permanente. Le patient du Croque-mitaine confond allégrement les deux pendant tout l’entretien, où il est constamment sur la défensive: « Je sais ce que vous pensez, que je suis un dingue de plus à inscrire sur vos tablettes, je m’en rends bien compte, mais vous n’étiez pas là, vous, espèce de fouille-merde pouilleux. » (148) Au psy, considéré comme un « maudit réducteur de crânes » (140), le personnage affiche la prétention d’une vie sexuelle exemplaire: « Rita et moi avions une vie sexuelle parfaitement normale; on n’a jamais rien fait de ces choses dégoûtantes. Je sais que ça défoule de parler de ça, mais je n’en fais pas partie. » (142)

    Si l’on étudie de plus près les raisons de cette confusion entre psychiatrie et psychanalyse, on peut y voir deux origines. D’abord, on l’a déjà vu, et ce fait est confirmé par Tabitha, King a toujours eu peur de la folie, à cause de ses antécédents familiaux. Lors d’une interview, Martin Coenen l’interrogeait: « Êtes-vous fasciné par les maladies mentales? ». King répondait: « D’une certaine façon, je le suis. J’ai toujours eu un peu peur moi-même de devenir fou, et j’ai toujours été fasciné par le cheminement des esprits soumis à un grand stress » (Phénix 2, 82) Et surtout il a peur de ce qu’un psychologue pourrait déceler de sa vie privée. À de nombreuses reprises, il a mis en garde ses lecteurs contre de telles interprétations: « Toute cette démonstration est bien intentionnée, mais c’est quand même de la connerie pure, et on ne me fera jamais prendre des vessies pour des lanternes (…). Les écrivains de fantastique et d’horreur doivent fréquemment encaisser ce genre de conneries… le plus souvent du fait de personnes qui considèrent, ouvertement ou en secret, que les écrivains d’horreur ne sont pas tout à fait sains d’esprit. A leurs yeux, les romans d’horreur ne sont que des tests de Rorschach qui finiront par leur révéler les fixations anales, orales ou génitales de leurs auteurs (…). L’écrivain d’horreur, lui, est toujours invité à s’allonger sur un divan. », (Pages Noires,150).
    Dans Rage, le psychologue scolaire rencontré tout à l’heure regarde sous les jupes des filles, mais n’ose pas utiliser lui-même publiquement les mots dont il se sert avec sa clientèle. Par l’interphone de la classe, le lycéen révolté est en relation avec le psychologue de l’établissement. La classe, prise en otage sous la menace d’un revolver, est à l’écoute:
« – Depuis combien de temps es-tu psychiatre?
– Cinq ans.
– As-tu brouté ta bonne femme?
– Qu…(Une longue pause terrifiée). Je ne comprends pas ce que tu veux dire.
– Bon, je reformule la question. T’es-tu déjà engagé dans des pratiques bucco-génitales avec ta femme?
– Je ne répondrai pas à cette question. Tu n’as aucun droit…(…)
– Alors, t’as déjà brouté ta femme?
– Non!
– Tu mens! Tu as dit que tu ne savais pas ce que cela signifiait.
– Tu m’as expliqué! » (19)
    Entretien pitoyable, marqué par l’hypocrisie latente, les inhibitions et les blocages mentaux d’un psy, dont la fonction devrait être apparemment de lever ceux de ses patients…

    Dans Gotham Café, King ajoute à ces caractéristiques la description d’un psy retors, plus avocat madré que thérapeute. King le ridiculise de plusieurs manières. D’abord par l’emploi répétitif de la même formule, pour faire face à diverses situations. Toute situation qui ne lui convient pas est appelée « contre-productive » et ce qualificatif revient souvent, comme lors de la discussion stérile entre les époux: «  »Arrêtez, c’est contre-productif », intervint Humboldt. Il avait l’air d’un pion qui, pendant la récréation, tente d’empêcher une bagarre. on aurait dit qu’il avait complètement oublié la liste de conneries de Diane; ses yeux balayaient la salle, à la recherche de notre serveur ou de n’importe quel autre membre du personnel. À ce moment précis, les problèmes de thérapie analytique le passionnaient infiniment moins que la perspective de s’en jeter un deuxième derrière la cravate. » (44) Et quand les événements dionysiaques les plus échevelés surgiront, causés par un maître d’hôtel apparemment fou, le psy sera incapable de diagnostiquer quoi que ce soit et ira niaisement à la mort.

La construction du récit.

    La construction binaire, que nous avons trouvée jusqu’alors dans les personnages et leur conduite, se constate évidemment au niveau de l’action. Désordre ordinaire, que l’on peut qualifier d’apollinien par rapport à ce qui va suivre. Des indices annonciateurs inquiétants. Et le grand désordre dionysiaque.
    Il y a d’abord une allusion au fait que si son avocat avait assisté au repas, il aurait pu se retrouver « tout aussi mort que William Humboldt. » (34) Plutôt singulier, alors que le lecteur se demande plutôt comment Steve pourra bien faire pour ne pas se laisser pigeonner, tant il paraît mal parti au milieu du récit. Arrivé à l’avance au restaurant Gotham, lieu du rendez-vous, il achète un parapluie dont il n’a nul besoin, pour tuer le temps! Le maître d’hôtel qui le reçoit lui semble bizarre, parce qu’il lui fait une remarque surprenante: «  »Il est interdit d’amener des chiens ici, dit-il d’un ton sec. Combien de fois vous ai-je dit que vous ne pouviez amener ce chien ici? » » (39) Steve est surpris, il ne voit pas de chien autour de lui. Mais il vit dans un état second, une « légère irréalité des choses », qui lui paraît dû au sevrage du tabac: « La nicotine améliore les transferts synaptiques et la concentration -autrement dit dégage les chemins de l’information dans le cerveau. Phénomène peu important et nullement indispensable pour réfléchir activement (…) mais qui vous laisse, lorsqu’il disparaît, avec un sentiment (diffus, dans mon cas) que le monde a incontestablement perdu de sa substance. » (37) Sont en tous cas quand même perçues par Steve deux caractéristiques: une tache de couleur sombre sur sa chemise, et un nœud papillon de travers, peu compatible avec le style du restaurant chic qu’est le Gotham Café de New-York: « Je n’avais ni le temps, ni la disposition nécessaire pour me mettre à épiloguer sur ce qui n’allait pas chez le maître d’hôtel d’un restaurant où je n’avais jamais mis les pieds et où je ne les remettrais probablement jamais. Mon problème, c’était Diane et Humboldt et arrêter de fumer; le maître d’hôtel du Gotham Café n’avait qu’à résoudre lui-même le sien, chien compris. » (40)

    Pendant tout le temps que durait la discussion sans issue entre les époux, le maître d’hôtel était en quelque sorte sorti du champ de Steve. Quand il réapparaît, le nœud papillon vertical, il tient des propos parfaitement incohérents: «  »Ce chien… iiiiii!… Je vous ai dit cent fois que ce chien… iiiiii! Pendant ce temps je peux pas dormir…iiiiii! Elle dit qu’elle va te les faire couper, cette connasse… iiiiii! Pourquoi vous me provoquez,… iiiiii! »
    Steve reste sans réaction, abasourdi. Mais le psy, qui n’a rien compris non plus à la situation alors que c’est son métier, intervient. Hors de propos. Sans analyser la cohérence de ce qui a été dit, il tient un discours inadapté: « Il se tenait debout, sa serviette à la main. Il paraissait surpris, mais également furieux. Je pris soudain conscience de deux choses: qu’il était ivre, complètement ivre, en fait, et qu’il considérait ce qui se passait comme une atteinte à la fois à son sens de l’hospitalité et à son professionnalisme.  » Et alors que le maître d’hôtel le menace du couteau qu’il tenait caché derrière son dos, il reproduit la suite d’attitudes et de propos convenus en des circonstances qui n’ont rien à voir avec celle-ci: « Il foudroyait le maître d’hôtel d’un ton furibond. « Ne vous attendez pas à me revoir mettre les pieds dans cet établissement si… , commença-t-il.
– Iiiiii! IIIIII! » s’égosilla le maître d’hôtel, brandissant le couteau de boucher droit devant lui. » (48)

Du dionysiaque gore…

    On ne va pas résumer la suite du récit, le décor étant suffisamment déterminé pour que l’on comprenne la démarche constructive de King. Et quand Dionysos règne, c’est le trivial qui l’emporte. Il peut même aller, comme ici, jusqu’à la description apocalyptique d’agressions sanglantes, d’organes corporels divers dégoulinants de toutes sortes de sanies, de destructions flamboyantes dont le King dionysiaque jubilatoire raffole. Car, comme il l’écrivait il y vingt ans, « sous le masque de l’écrivain d’horreur moraliste (qui, tel Henry Jekyll, est « la fleur même des convenances ») se dissimule une créature d’une tout autre nature (…). C’est un nihiliste convaincu qui, pour prolonger cette métaphore Jekyll-Hyde, ne se contente pas de piétiner les os fragiles d’une fillette mais estime nécessaire de danser la gigue sur l’humanité tout entière. Oui, mes amis, Le Fléau m’a donné l’occasion d’annihiler l’espèce humaine et j’ai pris un pied d’enfer! » 6.
    Le psy est d’abord blessé au visage: « La lame émit un sifflement, comme une phrase murmurée dont le point final aurait été le bruit qu’elle fit en s’enfonçant dans la joue droite de William Humboldt. Le sang jaillit en une explosion furieuse de gouttelettes qui vinrent décorer la nappe d’un éventail en pointillés, et je vis clairement (je ne l’oublierai jamais) une goutte d’un sang rouge brillant tomber dans mon verre d’eau et couler jusqu’au fond, laissant derrière elle un filament rosâtre. On aurait dit un têtard ensanglanté. » (49)
    Puis le psy est atteint dans l’organe qui est son instrument de travail: « Puis le maître d’hôtel, tenant le couteau à deux mains, l’enfonça en plein milieu du crâne de Humboldt. Le son évoquait un coup de canne sur une pile de serviettes.(…)
Le maître d’hôtel -dont les cheveux étaient à présent tout hérissés- arracha le couteau du crâne. Du sang jaillit de la blessure, formant une sorte de rideau vertical, et vint éclabousser la robe de Diane. » (51)
    Ensuite le fou s’en prend à Steve, et une extraordinaire poursuite s’engage dans les cuisines, dont le rythme effréné est rarement mené par King dans ses romans avec autant de brio. Il n’y a pas intérêt à se trouver sur le chemin du fou: « Derrière lui, je voyais le chef s’efforcer de se remettre debout. Il se tenait d’une main à la poignée du réfrigérateur et, de l’autre, étreignait sa blouse imbibée de sang; le tissu déchiré, à hauteur de son estomac, dessinait un grand sourire cramoisi. Il luttait de son mieux pour empêcher sa tuyauterie de sortir, mais la bataille était perdue d’avance. Une boucle d’intestins brillante, couleur d’ecchymose, pendait déjà à l’extérieur et lui faisait une hideuse chaîne sur le côté gauche. » (56)
    L’expression triviale chez King participe ici d’un comportement à la fois ludique, jouissif et libératoire et remplit, comme toute sa production d’horreur, une fonction thérapeutique. Elle serait compensatrice d’un besoin de laisser-aller et de désordre qu’il a peur de satisfaire dans sa vie ordinaire. Le lecteur de cet article qui serait intéressé pourra se reporter à la seconde partie de mon étude King et le trivial.

… au dionysiaque cosmique.

    King ne serait pas entièrement satisfait s’il ne pouvait ajouter un prolongement cosmique à cette histoire. Et cette suite, en rupture avec la vie ordinaire que nous connaissons, propose des perspectives sur un univers autre, à la Lovecraft. D’abord le personnage, dont l’aspect physique ressemble à celui de Leland Gaunt, dans Bazaar: le profil usuel du diable. Ensuite les propos qu’il tient ressemblent, par leurs caractéristiques, à ceux du flic investi mentalement par l’entité Tak de Désolation qui vient de la nuit des temps: « Il continuait à éructer un charabia dans son langage spécial maître d’hôtel. (…) Une partie de ce qu’il disait était effectivement dans une langue étrangère, une autre en anglais, mais totalement dénuée de sens; certaines choses étaient cependant frappantes., presque inquiétantes. Ceux qui ont lu la longue déclaration que fit Dutch Schultz sur son lit de mort comprendront sans doute ce que je veux dire. J’ai presque tout oublié des ratiocinations du maître d’hôtel, mais je crains de me souvenir toujours du peu qu’il m’en est resté. » (50)
    Steve essaie de s’expliquer rationnellement-y croit-il?- le comportement du singulier maître d’hôtel: « J’imaginais Guy [nom du maître d’hôtel] allongé sur le dos, bien réveillé mais parfaitement immobile, contemplant le plafond pendant les petites heures de la nuit tandis que la lune restait suspendue au firmament noir comme l’œil à demi fermé d’un cadavre; je l’imaginais ainsi, écoutant les aboiements monotones et réguliers du chien du voisin, un son qui se répétait à n’en plus finir, clou d’argent qu’on lui aurait enfoncé dans le crâne. (…) Je me demandai s’il avait tué sa femme. Si oui, l’avait-il tuée avant de se rendre à son travail? J’évoquai la tache de sa chemise et en conclus que c’était une possibilité. Je me posai aussi la question pour le chien du voisin, celui qui ne la fermait jamais. Et pour la famille du voisin. » (63)

    Le comportement de Steve à la fin du récit est singulier: lui aussi s’est trouvé sur son lit, « allongé, incapable de dormir, pendant toutes ces nuits où je n’arrivais pas moi-même à trouver le sommeil, écoutant le chien ou les bruits de la rue comme j’avais écouté les sirènes et le grondement des camions. je l’imaginais regardant les ombres que la lune découpait sur son plafond. je pensais à ce cri -iiiiii!- montant en puissance dans sa tête comme un gaz s’accumulant dans une pièce fermée.
« Iiiiii », dis-je pour voir l’effet que cela faisait ». Il piétine le paquet de cigarettes qu’il vient d’acheter: «  »Iiiiii. « Iiiiii. « Iiiiii. » »
    L’un des flics en faction -on ramasse alors les corps- l’interrompt, et Steve cesse de piétiner en parlant son paquet de cigarettes: « J’arrêtai de faire ce bruit. Je l’entendais toutefois dans ma tête, et pourquoi pas? il avait autant de sens que n’importe quoi, au fond.
Iiiiii
Iiiiii
iiiii. » (64)

    Il faut ajouter à ces événements macabres un épisode qui tient d’un type de non-sens qui s’introduit providentiellement dans le dionysiaque pour en bouleverser le cours, mais d’une manière saugrenue. C’est un procédé que King utilise souvent. On se souvient de ce parapluie acheté par Steve pour tuer le temps, alors qu’il fait beau et qu’il n’a pas besoin de cet accessoire. Le parapluie traîne par terre depuis le début du repas, « l’étiquette portant le prix encore attachée à la poignée. Je me sentis tout d’un coup un vrai Mickey. » (46) Les caractères absurdes et simultanément opérants de ce parapluie ne se manifesteront que lorsqu’il se trouve dans la main de Steve: « S’il y bien une chose que j’ai oubliée, c’est à quel moment je l’avais ramassé. » (51) C’est grâce à ce parapluie, « l’étiquette du prix dépassant de [son] poing », que Steve fait face à son agresseur. Et il est surtout aidé par un incident imprévu: « À cet instant, comme dans un gag de café-théâtre, le parapluie s’ouvrit. » (52)
    Ce parapluie qui s’ouvre d’une manière inattendue qui influe sur le cours des événements donne au dionysiaque de King un aspect absurde qui ajoute à son anomie. Le cours (ordonné?) du désordre modifié par un autre désordre…
    Deux autre incidents de cet ordre sont encore à mentionner, parmi d’autres. A un moment crucial de sa lutte contre le maître d’hôtel, Steve et sa femme sont acculés à une porte dont Diane ne sait pas ouvrir -dit-elle- les verrous. Steve reçoit… un coup de pied au derrière, doit lettre genou en terre et se trouve en état d’infériorité. L’affaire terminée, il demande des explications:
« – « Tu m’as donné un coup de pied au cul, tout à l’heure, salope ; Tu m’as botté les fesses et tu as failli me faire tuer! Nous faire tuer. Je n’arrive pas à y croire! » »
    On prend alors conscience du décalage qui peut exister entre la réalité, avec son urgence, et les abîmes des sentiments humains: «  »J’avais envie de te botter les fesses depuis plus d’un an, répondit-elle. Quand il s’agit de réaliser un rêve, on ne choisit pas toujours le moment… » » (61)
    La victoire de Steve sur le maître d’hôtel est l’autre circonstance qui permet à King de faire virer le dionysiaque en absurde à la Hellzapoppin : « Sans réfléchir, à peine conscient des hurlements que je poussais, je m’emparai de la poêle aux champignons et je l’abattis sur sa figure, aussi fort que je pouvais. Il y eut un choc sourd suivi d’un sifflement horrible (mais heureusement bref), celui de la peau de ses joues et de son front qui brûlaient » et le maître d’hôtel se retrouve sur le carrelage « les champignons carbonisés lui dessinant une auréole autour de la tête. » (59)

    On ne sait pas ce qui est arrivé au personnage plus tard. S’il a été psychiquement ébranlé, il s’en est remis, puisqu’il nous fait le récit de cette tragédie à la première personne. Avec lucidité, il évalue après coup les conséquences de son sevrage du tabac sur les événements. Il est assez lucide pour constater qu’il s’en est sorti en partie en planant lors de son sevrage: « Personne ne peut prédire les conséquences ultimes de ses actes, après tout, et rares sont ceux qui s’y essaient; la plupart du temps, nous faisons tout notre possible pour prolonger un moment de plaisir ou mettre un terme, fût-il provisoire, à ce qui nous fait souffrir. Et même si nous agissons pour la plus noble des raisons, le dernier maillon de la chaîne est trop souvent taché du sang de quelqu’un. » (28)
    Remarque lucide, d’un esprit apparemment serein. Mais pour combien de temps?

    Iiiiii?

Armentières, le 09 mars 1999.

 


 

Déjeuner au Gotham Café,

Résumé:
UNE NOUVELLE DIONYSIAQUE.

    Quand King commence une histoire, il utilise habituellement le procédé bien connu de l’intrusion du désordre dans l’ordre, du dionysiaque dans l »apollinien. L’ordre, c’est la famille qui ronronne, le couple qui fonctionne bien, la petite banlieue tranquille. Bref, ce qui donne aux choses leur allure habituelle, la vie avec ses petites joies et sans grandes surprises. Gotham Café est un bon exemple de la nouvelle qui dérape d’un désordre ordinaire pour atteindre le délire dionysiaque intégral. Ce récit a en outre la particularité d’utiliser plusieurs des peurs avouées ou cachées de King.

 


 

1 Déjeuner au Gotham Café (Lunch at the Gotham Café). Création: 1995. Première publication: Dark love, anthologie de textes rassemblés par Nancy A. Collins, Edward E. Kramer et Martin H. Greenberg, 1995, avec une introduction de T.E.D. Klein. (Deuxième publication en édition limitée Six Stories.1997). Trad. fr.: anthologie Noir comme l’amour. Édition fr. Albin Michel, 1998.
Cette nouvella a obtenu du Bram Stoker Award le prix de la meilleure nouvelle 1995.

2 Selon cette distinction sociologique importante, les hommes et sociétés apolliniens tendent vers la recherche d’un bonheur équilibré et raisonnablement régulé (Apollon est le dieu du soleil, de la beauté et de l’harmonie). Les hommes et sociétés dionysiaques (Dionysos représente l’instinct et la violence) sont axés sur la compétition et tendent à promouvoir une personnalité agressive. Ces notions, qui correspondent, en gros, à ce que nous pourrions appeler la coexistence de l’ordre et le désordre, pour les chrétiens du bien et du mal, sont, pour King, des outils d’un usage général. Par exemple, « L’histoire d’horreur décrit l’irruption d’une démence dionysiaque dans un univers apollinien, et l’horreur persiste jusqu’à ce que les forces dionysiaques aient été repoussées et la norme apollinienne restaurée », Pages Noires, 20. Autre exemple, King présente comme un « symbole élégant » de la dualité de la nature humaine l’immeuble du Dr Jekyll: « Du côté Jekyll, l’ordre règne et la vie poursuit son cours apollinien. De l’autre côté, c’est Dionysos qui mène la danse. Ici entre Jekyll, et là ressort Hyde. », Anatomie, 87.

3 L’énumération continue: l’eau et l’air sales; la couche d’ozone; le SIDA par transfusion; les gaz d’échappement produits par la circulation, l’amiante, etc., interview de Martin Cohen, (Phénix 2, 43).

4 Voir les échos multiples sur ce sujet, notamment dans Brume, Quitters, Inc. (nouvelle consacrée à une méthode radicale pour arrêter de fumer), La peau sur les os, qui ont été autant de moyens de neutraliser les peurs du moment.

5 Voir note précédente.

6 Pages noires, 208.





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