Rose Madder
(Caroline Guichet)
Publié aux États-Unis en 1995, le roman ROSE MADDER nous plonge une fois de plus dans le monde de la TOUR SOMBRE, mais cette fois-ci à la manière de THROUGH THE LOOKING GLASS/DE L’AUTRE COTE DU MIROIR, de Lewis Carroll.
Rosie Daniels, battue par son mari Norman (policier de surcroît), décide de s’enfuir, de changer de vie. Mais son époux n’entend pas la laisser s’en aller aussi facilement et va commencer à la pourchasser. Pendant ce temps, Rosie va découvrir un tableau assez particulier qui va se révéler être en fait un passage vers un autre monde.
Dans ce monde parallèle au notre, Rosie va faire la connaissance de Rose Madder, une sorte d’alter ego :
« What you do for me I will do for you. And that’s why we were brought together. That is our balance. That is our Ka… » (N.D.L.R. : Même si le roman n’est pas encore disponible en version française, nous vous proposons la traduction suivante : « Ce que tu fais pour moi, je le ferai pour toi. Et c’est pourquoi nous étions amenées à nous rencontrer. C’est notre équilibre. C’est notre Ka… »).
Dans le roman, une certaine ville de Lud est également évoquée. Ce nom doit vous rappeler quelque chose si vous avez lu THE WASTE LANDS/TERRES PERDUES, puisque c’est dans cette ville que Roland le Pistoléro, Susannah, Eddie, Jake et Oy (Ote dans la version française) embarquent à bord de Blaine le Monorail.
« I’ve seen bodies on fire and heads by hundreds poked onto poles along the streets of the city of Lud » (Traduction proposée : « J’ai vu des corps en feu et des têtes par centaines empalées sur des poteaux le long des rues de la ville de Lud »).
D’autres éléments permettent de rapprocher le monde de Rose Madder et celui de Roland. D’abord le fait que les constellations soient différentes de celles que l’on peut voir depuis la Terre de notre époque :
« The sky sprawled with stars, but Bill recognized none of the constellations they made. » (Traduction proposée : « Le ciel était rempli d’étoiles mais Bill ne reconnaissait pas les constellations qu’elles dessinaient. »). Eddie Dean fait la même remarque dans THE DRAWING OF THE THREE/ LES TROIS CARTES.
De plus, quand Rose Madder affronte Norman Daniels/Ze Bool, elle prend la forme d’une… araignée ! L’araignée est une entité qui revient fréquemment dans l’oeuvre de King. Tout laisse à supposer qu’elle serait la gardienne de la Tour (N.D.L.R. : Voir notre numéro Hors-Série spécial Tour Sombre).
Dans THE WASTE LANDS/TERRES PERDUES, la Tour Sombre est symbolisée par une rose… une rose malade. Rose Madder nous est, elle aussi, décrite comme étant malade physiquement ainsi que mentalement.
« Once (…) her face had been one extraordinary beauty, perhaps a face to rival Helen of Troy’s. Now her features were haggard and beginning to blur (…) Underneath the beauty was madness… But not just madness ».
(Traduction proposée : « Autrefois, son visage avait dû être d’une beauté extraordinaire, un visage qui aurait peut-être pu rivaliser avec celui d’Hélène de Troie. Maintenant, ses traits étaient hagards et commençaient à s’estomper (…) Sous cette beauté, il y avait de la folie… mais, pas seulement de la folie »).
La folie est un thème très présent dans ROSE MADDER. Norman Daniels, le mari de Rosie, sombre de plus en plus profondément dans la démence. Dès le début du roman, il apparaît comme un homme très violent, puis son esprit va de plus en plus être contrôlé par une entité appelée « Ze Bool » dans notre monde, et Erynies dans le monde de Rose Madder :
« (…) something had crawled up from the bottom of his mind and made him do it. That thing was there more and more now, and he couldn’t think of it (…) It felt like there was some horrible fetus in the middle of his head, trying to be born (…) It was a demon (…) but it was also a man. It was Norman (…) ».
(Traduction proposée : « (…) quelque chose était remontée en rampant depuis le fond de son esprit et l’a fait agir ainsi. Cette chose était là de plus en plus souvent maintenant, et il ne pouvait s’en souvenir (…) C’était comme s’il avait un horrible fœtus au milieu de sa tête, essayant de naître (…) C’était un démon (…) mais c’était aussi un homme. C’était Norman (…) »).
Dans la mythologie Grecque, les Erynies étaient des divinités infernales (l’équivalent des Furies Romaines). Elles punissaient les crimes tels que la démesure, l’homicide et les crimes contre la famille ; elles tourmentaient leurs victimes en les frappant de folie…
Dans ROSE MADDER, Erynies est le nom du Taureau qui est enfermé dans un labyrinthe. Serait-ce là une allusion de Stephen King au célèbre labyrinthe du roi Minos où était enfermé le Minotaure (créature mi-homme, mi-taureau) ? Il est à noter également que le poney qui se trouve dans le tableau de Rose Madder s’appelle Radamanthus. Toujours dans la mythologie Grecque, Radamanthus était le frère du roi Minos. Après sa mort, il devint l’un des trois Juges de l’Enfer, aux côtés de son frère Minos…
ROSE MADDER nous démontre une fois de plus le talent de Stephen King. Un roman à lire d’urgence !!!
Lille, Novembre 1996.