The Green Mile (La Ligne Verte, de Stephen King), un feuilleton
(Roland Ernould)
Quand son projet de faire paraître l’œuvre en feuilleton eut pris forme, à la suite de circonstances expliquées dans sa préface, King avait « déjà pas mal avancé » sur The Green Mile: « Je pris conscience que je m’étais lancé dans la construction- disons classique – d’un roman » (l.09). Il lui avait nécessairement fallu, à partir de l’instant où sa décision fut prise, de revoir son travail : « Quoi qu’il en soit, je décidai de publier The Green Mile en épisodes, à la manière des feuilletonistes du XIXème siècle » (l.10). Dans l’étude paru dans le hors-série n°2 du Steve’s Rag, octobre 1996, j’avais conclu que King ne s’était pas borné à tronçonner un roman en épisodes (serial story), mais avait bien écrit un roman-feuilleton à suspense (cliffhanger).
King avait aussi annonce son intention de publier The Green Mile en un volume, « défi d’un autre genre » (6.92). Ce roman était annoncé depuis quelque temps et on l’attendait avec impatience.
En effet, l’intérêt qu’il y aurait à disposer de la même œuvre sous la forme d’un roman était évidente. Le roman » ordinaire » dont il était parti avait dû subir de telles transformations en cours de route qu’il ne devait plus être qu’une trame, à reprendre et à réécrire. Il aurait donc été intéressant de comparer la version » roman » à la version » feuilleton « . L’espérance était d’autant plus grande que King signalait : « J’ai dû écrire à la hâte, chaque échéance étant incontournable. Ce ne fut que plus excitant, mais il est possible que cela ait donné lieu à quelques anachronisme (…). Je corrigerai peut-être ces erreurs si je décide de publier La Ligne Verte en seul volume. J’ai bien dit » peut-être « » (6.91). Il lançait également un appel à ses lecteurs : « Si vous avez des idées à propos de La Ligne Verte en un seul volume, n’hésitez pas à m’en faire part » (6.92).
Les lecteurs ne semble pas avoir eu plus d’idées que Steve, trop occupé à la finition de Wizard and Glass, dont l’édition de la traduction française est annoncée pour le printemps 1998 : La Ligne Verte en édition roman, publiée ces jours-ci, reprend sans
changer une virgule la version feuilleton. Le seul ajout tient en une note de l’éditeur (page 10), signalant que la rédaction du feuilleton avait été achevée au printemps 1996….
La déception est grande. Il est donc peu probable qu’on sache un jour si les prisonniers
écoutaient bien Allen’s Alley à la radio en 1932 (5.34 ou 276), ou Paul Kay Kyser et son Kollege of Musical Knowledge (6.51 ou 360). Ou plus grave, si le petit livre porno dont Popey et Olive étaient les héros existait bien… Trêve de plaisanteries : L’éditeur aurait pu annoncer plus nettement qu’il s’agissait d’une simple reprise des épisodes, qui refont ainsi une deuxième carrière après avoir été vendus à plus de 1.400.000 exemplaires. Et ne pas entretenir les illusions.
Notons encore que si le nom de l’éditeur n’est pas librio mais Editions 84, l’adresse est la même. Enfin le livre coûte 89 Fr. alors que les six fascicules n’en coûte que 60 et sont toujours disponibles. Il est vrai qu’il y a sept gravures dans le livre. Aux amis lecteurs qui n’aurait pas encore fait l’achat – il doivent être peu nombreux – de voir si la différence de prix justifie leur acquisition. En tous cas, qu’ils soient prévenus qu’ils n’y trouveront pas un mot de plus que dans les fascicules. Et d’autant plus que l’achat de Rose Madder, enfin paru chez Albin Michel, s’impose d’urgence.
Armentières, le 29 septembre 1997.