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Divers

Steve’s Rag 16 – La rage de Richard Bachman

La Rage de Richard Bachman

(Dario Coccia)


Un Running Man qui Marche ou Crève dans sa lutte contre le chantier.

Le nom de Richard Bachman est récemment apparu sur les étagères des libraires et dans l’actualité littéraire avec la publication de THE REGULATORS/LES REGULATEURS.

Mais qui est réellement Richard Bachman ? Est-il simplement un pseudonyme de M. King ?

En ce qui me concerne, je pense quai est bien plus qu’un nom de plume ou un procédé éditorial. Il est un style, une dimension dans laquelle Stephen Edwin King a décidé d’entrer pour dire des choses sans avoir à subir les préjugés qui accompagnent le nom de Stephen King. Pour moi, les véritables romans de Bachman sont RAGE, THE LONG WALK (MARCHE OU CREVE), ROADWORK (CHANTIER) et RUNNING MAN.

THINNER (LA PEAU SUR LES OS) représente la frontière donnant sur la « dimension King » et ce n’est pas seulement parce que THINNER fut le roman qui accompagna la révélation de la véritable identité de Richard Bachman.

Quels sont les thèmes traités par Bachman ?

Et bien, Richard Bachman semble avoir beaucoup de mépris envers la Société Américaine, et les sociétés où le masque a plus d’importance que le visage, où, au nom du progrès, l’homme construit aussi sur « l’inconstructible » (les sentiments humains). Il est contre toute forme d’apparence et les affaires qui éclipsent le cœur. Dans ses ouvrages THE LONG WALK et THE RUNNING MAN, il nous remet en mémoire 1984 de George Orwell.

Richard Bachman est-il la part sérieuse de Stephen King ?

Il y a beaucoup à dire sur ce sujet. Je pense que Stephen King est un écrivain « sérieux » mais je crois qu’il faut avant tout définir le terme « sérieux » et la subjectivité de cette définition causera de nombreux problèmes.

Il serait plus simple de dire que Richard Bachman est une partie de Stephen King, mais une partie importante.

Les romans de Richard Bachman sont puissants, avec un impact créé sur le lecteur. Deux de ces romans nous entraînent dans un futur hypothétique, mais si on les regarde d’un peu plus près, ils montrent en fait notre société et ses problèmes, et Bachman n’est pas vraiment optimiste sur le sujet.

Richard Bachman est-il si différent de Stephen King ?

Je ne pense pas. Ils ne sont que « 2 » écrivains qui parlent des horreurs de notre monde.

Le pouvoir de Carrie et des vampires de SALEM’S LOT ne sont pas si éloignés de la rage de Charlie Decker, du désespoir de George Barton Dawes et des sociétés décrites dans THE LONG WALK et THE RUNNING MAN. Ces sociétés, et ce qui leur arrive, représentent les mêmes sociétés que celles qui apparaissent dans d’autres livres de King.

Alors, pourquoi ce pseudonyme ?

Beaucoup de gens (de critiques) pensent qu’un livre contenant des éléments supranaturels ne peut être qu’un ouvrage de divertissement. Tout livre contenant des éléments supranaturels ou concernant l’horreur (tels qu’on les définit) ne peuvent parler de choses intéressantes.

La rage de Charlie Decker est la rage de vivre dans un monde où les gens ont perdu leur propre identité, un monde où règne l’hypocrisie. Charlie Decker apparaît comme un goujon dans un uniforme mosaïque. Il semble fou. Mais l’est il réellement. N’est il pas la norme dans un monde fou ? C’est ce thème que l’on retrouve dans I AM LEGEND de Richard Matheson, roman qui eut une influence non négligeable sur King. .

Charlie combat la tromperie et ses agissements ouvrent les yeux de ses amis, qui de ce fait, apprennent quelque chose qui construira leur futur. Ted Jones, qui représente le système, affirme que Charlie n’est pas nome mais l’aventure qu’il vit aura des répercutions sur son esprit et il n’oubliera jamais ce qui s’est passé dans cette classe.

Durant quelques heures, tout le monde fut vrai ; durant quelques heures, tout le monde (la classe) a perdu ses préjugés, ses stupides conventions sociales. Tout ce microcosme fut réellement libre.

Charlie affirme que tout ceci est à la base du changement. Mais en fin de compte, Charlie a-t-il réussi à changer le « monde » ?

Il a peut-être montré la lumière durant un instant, mais l’obscurité des préjugés et de la tromperie est immense et, à la fin, dans l’hôpital, Charlie aura besoin d’un peu de cette incohérence. Il mange quelque chose qu’il détestait et affirme qu’il apprécie. Ainsi il conserve un secret, un petit secret.

Dans un monde où ce n’est pas possible d’être le même à l’intérieur et à l’extérieur, Charlie a perdu la bataille. Mais durant un moment, nous avons pu voir l’âme des gens et non plus des morts vivants.

« As the variables increase, the axioms never change » (Les données changent mais pas les axiomes). C’est ce que déclare Mrs Underwood. N’est-ce qu’un théorème d’algèbre ? Hélas non, ce n’est qu’une triste vérité !

Charlie a essayé de changer les données (faisant joindre d’autres personnes dans ses actions). Mais les axiomes (attitudes hypocrites, préjugés, schémas sociaux…) ne changent pas !!!

Un fin pessimiste qui est caractéristique de Bachman.

THE LONG WALK est un roman très intéressant pour son champ d’action. Toute l’histoire se passe sur la route.

Dans une société hypothétique, chaque année, des garçons d’environ 18 ans se préparent pour la Longue Marche. Les règles sont simples et claires. Chaque marcheur participe à la course selon certaines conditions : Marcher à une certaine vitesse minimum. Chaque fois que le marcheur passe sous cette limite, il reçoit un avertissement. Trois avertissements maximum ! Ensuite ? Ensuite la mort! N’est-ce qu’une marche ?
Non, comme dans tous les romans de Bachman (tout comme dans beaucoup de livres de King, la métaphore est importante.

Ici il s’agit de la marche de la vie. Marcher, rencontrer, mourir!

Le chemin de la vie où l’on surmonte les problèmes, on rencontre les amis, l’amour surpassant tout et continuer à marcher, oui, marcher vers la mort !

Personne ne gagne dans cette marche, et à la fin, lorsque tout le monde pense que Ray fait une arrivée victorieuse, il voit en fait une silhouette noire, l’ombre, la fin, le commencement, la mort (qui nous attend à la fin de la marche de la vie).

Une vie menée à toute allure en respectant &étranges règles, une vie où l’on n’a pas le temps de penser, de comprendre. Une vie où l’on n’a que le temps de marcher en oubliant pourquoi.

C’est bien notre vie

Une vie menée dans la même société que celle que Charlie veut changer, une société emplie de règles « étranges », notre société.

Et nous marchons, encore et encore et encore. Nous n’avons pas le temps de nous arrêter. Nous avons peur des avertissements mais nous ne comprenons pas que c’est ainsi que nous finirons par faire face à la mort.

« Je ne sais pas pourquoi. Apparemment, Dieu non plus. Ce sont les affaires du gouvernement, c’est tout. » (Interview d’un homme dans la rue concernant le Vietnam – environ 1967)

Je ne sais pas pourquoi. George Barton Dawes ne sait pas pourquoi. Mais pourquoi ? Pourquoi cette route ? Pourquoi le fils de George est-il mort d’une tumeur au cerveau (NDT : Un thème très Kingien) ? Pourquoi son manage échoue-t-il ?

Pourquoi ?

Beaucoup de questions pour peu de réponses.

Parce que George vit dans « un monde de merde », un monde identique à celui de Charlie, un monde dans lequel Ray Garraty marchera (pour vivre), un monde où Ben Richards jouera sa vie.

Et que dire d’un monde qui vous détruit ? Que faire ?

Dawes connaît une réponse, une réponse insensée pour un monde dément : « se battre », et il se battra pour obtenir ce qu’il mérite et pour défendre des droits que le monde oublie chaque jour.

Mais Dawes n’est pas « Rambo », c’est un homme comme les autres qui découvre la mort dans son combat.

Parfois la mort est bien plus digne qu’une vie « silencieuse ».

George est-il un héros ? Un autre de ces fous ? Je ne sais pas.

THE RUNNING MAN nous montre un autre thème important, une société dans laquelle nous pouvons jouer de l’argent, nous pouvons jouer

au football, au base-ball mais le jeu le plus amusant est celui où vous jouez votre vie.

Ce roman est une critique d’un monde où, au nom du spectacle, tout est bien et les valeurs humaines sont oubliées.

Le fait que l’époque ne soit pas précisée nous montre qu’il ne s’agit pas d’un futur précis mais simplement d’un demain.

Ben Richards joue par amour, il a besoin d’argent pour aider sa famille et le JEU est sa dernière chance. Mais le spectacle ne prend pas en compte les notions d’amour et de pitié. Ce spectacle est cruel et a besoin de victimes.

Ben essaiera de jouer, mais à la fin, on comprendra que tout est écrit. Il n’a pas les possibilités de gagner face au pouvoir du JEU. Il est la victime qui doit être sacrifiée au nom du spectacle. Ce dernier est semblable à un dieu assoiffé du sang de ses victimes. Que faire ?

Ben Richards décide de ne pas mourir inutilement et conduit alors l’avion qu’il pilote à s’écraser sur le Palais du Jeu.

Il trouvera la mort mais son acte symbolise la rébellion d’un homme face à un dieu trompeur et cruel.

Et l’espace d’un instant, ce n’est plus le spectacle qui doit continuer mais la liberté. Ben, est-il fou ?

Et bien, je crois pouvoir répondre à cette question, ainsi qu’aux questions précédentes. La réponse est NON !!!

Charlie, Ray, M. Dawes et Ben sont les victimes d’une société démente. Ce sont des hommes comme les autres, qui veulent simplement être vrais ; Mais dans un monde de tromperies, être vrai peut s’avérer être très dangereux.


Italie – Janvier 1997
(Traduction : Lou Van Hille)





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